LA VIE EN BLEU DANS LA VILLE ROSE
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Introduction : « Bonjour, je suis Penny l'amie et assistante de Bob. Ça c'est pour ceux qui ne suivent pas. Là, je dois dire que les messieurs à moustache, cheveux plus sel que poivre, avec un holster et une Laguna bleue de 1994, c'est tout fait pour me mettre dans tous les états... »
La dame toulousaine a pris une avalanche de coups de couteau et... elle est morte. Son mari, un drôle de mec tout à fait détendu, verbeux, se retrouve en garde à vue. C'est le sieur Gégé, assisté de Victor son stagiaire, qui doit se taper cette affaire qui semble bouclée d'avance. Mais dans la famille Duval il y a aussi le fils.
Toulouse, l'auteur il connaît bien, il y a baladé son Sig Sauer. Il était flic et comme dit la chanson « Quand un condé rencontre un autre condé qu'est-ce qu'ils s'racontent ? Des histoires de condés. » Et c'est un peu la finalité de ce récit qui, s'il met en scène une enquête avec un rebondissement de dernière minute, fait la part belle au métier en nous offrant en live les turpitudes et les épanchements d'un sacré lascar nommé Gérard Escaude, capitaine de police affecté au commissariat de St Cyprien – pas celui en bord de mer. Le Gégé c'est un phénomène. Il ne crache pas sur le jaja, maudit son nouveau chef qu'il pendrait bien par les roubignoles pour lui faire passer son cynisme et son arrivisme. Ça commence mal pour lui car au lieu de rejoindre Maurice en Ariège pour poser la mouche sur le nez des truites et se taper un bon gueuleton, c'est un meurtre qu'il va devoir gérer. Et alors qu'il pense que ce sera plié en deux temps trois mouvements, des indices vont lui livrer des informations et ce sont des heures sup qu'il va se taper. Faut dire que M. Duval a le chic pour semer le doute. Avec une assurance déconcertante, il s'exprime comme un homme cultivé, droit dans ses bottes et il n'est absolument pas bouleversé. Ainsi, il convainc Gégé qui va tomber de haut un peu plus tard. Voila comment parfois des innocents se retrouvent en taule alors que des criminels vont rejoindre leurs pénates tranquillou.
L'auteur ne cache pas son plaisir lorsqu'il décrit avec faconde les faits et gestes de ce policier qui fonctionne à l'ancienne. Il ne se dérobe pas quand il parle des rebeus du Mirail et des gitous, des bars à pute et des gorgeons de jaune au bureau. Autant dire que l'on baigne dans un réalisme qui fait souvent sourire et parfois méditer. Le métier de flic a bien changé, parait-il. Le choix de ce jeune stagiaire qui a bien humé l'atmosphère et a tout de suite pigé comment s'intégrer dans le milieu (sans M majuscule) nous offre quelques passes d'armes réjouissantes.
« Victor mon poussin, tu sais que si tous les cons avaient le vertige, on te verrait jamais à l'étage.[...] Bien, pour le GIC sur Duval fils, t'as vu le taulier ? »
« Oh oui ! Même que pendant que Môôssieur faisait sa croisière jaune et entretenait ses souvenirs de bringue et son ulcère, l'humble vermisseau stagiaire que je suis rédigeait à sa place la demande à l’État-major de Beauvau. »
Non, il n'y a pas un suspense à couper le souffle, non plus des balles qui sifflent – celui qui siffle (des boutanches) c'est Gégé -, des cadavres en veux-tu en voilà dans ce récit policier. On voit la vie en bleu et c'est pas toujours rose – même à Toulouse. Rappelons que Patrick Caujolle est un passionné de poésie, ainsi son style est parfois lyrique mais il se muscle au besoin en prenant une tangente que ne renierait pas Frédéric Dard. Une enquête policière (mais pas que...) à découvrir. Son nouveau roman « RIP » est paru récemment.
Mention : Natif de Toulouse et ayant souvent posé mes bagages dans ces Pyrénées là, je me permets de préciser que le surnom donné par les ariégeois aux toulousains est... les doryphores.
« Beau temps pour les couleuvres » ; Editions du Caïman ; Parution août 2014 ; 218 pages.
Patrick Caujolle a passé quinze ans à la crim du SRPJ de Toulouse. Outre plusieurs recueils de Poésie, il a publié Les Mystères de Haute-Garonne, Les mystères du Tarn et Garonne, Les Grandes affaires criminelles de Lot-et-Garonne chez De Borée, ainsi que La France polissonne, Les ennemis publics et Les casses du siècle, chez Papillon rouge éditeur. Son dernier ouvrage R.I.P. est paru aux Editions du Caïman.