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QUAND ON N’A QUE L’AMOUR - LE BLUES DE LA HARPIE - JOE MENO

Publié le par Bob

Introduction* : « Quand on n’a que l’amour, il ne nous reste que l’abîme où nous sombrons de jour en jour en attendant le choc ultime. »

La Harpie, patelin de l’Illinois. Il a tiré ses trois années de taule et rejoint dans sa ville natale son ami Junior, rencontré à l’ombre. Tous les deux ont un méchant fardeau qui pèse sur leur conscience. Luce Lemay, alors qu’il détalait après un braquage, a tué un bébé dans un malencontreux accident de la route. Quant à Junior Breen, il s’enferme désespérément dans un funeste mutisme. Ils trouvent un job, évitent les ennuis, tentent d’échapper aux regards inquisiteurs de la population. Et Luce tombe amoureux.

Ils ont payé leur dette à la société. Ils sont libres - Luce est en conditionnelle. Mais ils ne sont pas pour autant libérés de la culpabilité qui les tenaille. Luce semble vouloir faire pénitence - il n’est pas encore question de rédemption - en revenant malgré tout dans sa ville. Ses actes le prouvent. Il prête le flanc à la médisance, aux accusations et aux diverses attaques morales et physiques. Son retour montre son refus d’oublier le passé - sa faute et l’époque de son insouciance, son innocence.

C’est dans un hôtel minable qu’il retrouve après son travail son ami Junior qui a commis un geste effroyable - on l’apprend assez tard. Dans une ambiance morbide, Lady Saint-François, la patronne, conserve des petits cercueils contenant des animaux morts - on ose faire le rapprochement avec Saint-François d’Assises, le saint patron des animaux. Junior se réfugie dans ce sanctuaire, évitant tout contact avec l’extérieur. Autant dire qu’ils ne baignent pas dans un milieu propice à leur réhabilitation, leur épanouissement. Cependant, l’amour, s’il ne fait pas toujours des miracles, permet à Luce de connaître des émois et d’envisager un mince avenir.

L’auteur crée une atmosphère sombre - mêlant l’intimidation à la violence - qui se propage sur La Harpie dont la communauté n’est pas prête à offrir sa permission de sortie à ces deux jeunes et qui n’hésite pas à les malmener. Le lecteur se trouve confronté à un cas de conscience. Comment accorder le pardon ? - sachant que sans pardon il n’y a pas de vie en société. Joe Meno creuse habilement la psychologie de ses personnages tourmentés dans un style parfois poétique, toujours affiné avec des lueurs de malice.

L’une des promotions poétiques de Junior Breen affichée dans la station-service : « Méga promo sur les pneus d’occasion clairs et ronds comme des yeux envoutés où coule l’amour telle la sève. »

Il ne reste plus qu’à saluer la qualité de ce terrible récit où le moindre espoir est aussitôt enveloppé du voile noir du deuil, d’une tristesse accablante que son auteur parvient à transmettre avec talent. Que reste-t-il quand on n’a que l’amour ? Une ville, deux êtres torturés. Le blues de La Harpie (titre original : How the hula girl sings) a été édité en 2001. Nous comptons sur les éditions Agullo pour ne pas nous faire patienter aussi longtemps avec un prochain roman de Joe Meno.

Mention : Penny qui se lâche dans le style poétique, c’est beau !

*Penny est mon assistante et amie. Elle intervient en introduction de mes chroniques.

« Le blues de La Harpie » Joe Meno, éditions Agullo, traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Morgane Saysana, parution :26 janvier 2017, 288 pages.

 

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J
La question que je te pose, mon ami est simple et directe: pas de longueurs dans cette intrigue ? Je te demande cela parce que pour l'instant, j'ai des difficultés, à moins que ce ne soient mes choix, à accrocher. Amitiés. Jean
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B
Il n'y a pas d'intrigue. Du moins, cela ne revêt aucune importance dans l'esprit du récit. Les personnages, l'atmosphère, le thème enfin tout ce que l'on ressent et qui donne à réfléchir, c'est cela qui importe.La fin pourrait être tout autre, il me semble... Amitiés.