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SMOKE, C’EST DU BELGE !

Publié le par Bob

SMOKE, C’EST DU BELGE !

Un jour, on m’a dit Westlake - on n’est pas un con -, on m’a dit Dortmunder. J’ai donc fourragé dans le bazar que je fréquente parfois pour assumer mon fantasme : la découverte d’un illusoire trésor. Après m’être faufilé devant la vitrine des bijoux de grand-maman, les buffets campagnards authentiques en toc, le rayon X DVD (tout au fond et dans l’obscurité), je l’ai trouvé, blotti entre un Stephen King et un D’Ormesson. Le classement alphabétique n’est pas leur fort chez les bazardiers. La couverture m’a plu, le titre m’a rappelé un truc lié à la Belgique. J’avais enfin entre les mains mon first Donald Westlake. Sans Dortmunder.

Deux toubibs plutôt gays bidouillent dans leur labo avec leurs tubes à essai. Tu te calmes l’ami, je te vois venir. Grassement payés par l’industrie du tabac, ils tentent de démontrer que c’est pas si dangereux que ça de fumer. Pour tromper leur ennui (ou peut-être pour se donner bonne conscience), ils se penchent (hum...) sur le mélanome comme tatie Denise sur le berceau du dernier chiard de sa pénible de nièce, mais elle est pénible, vous pouvez pas savoir. Et ces cons-là accouchent de deux formules supposément magiques. Manque le gogo cobaye. Freddie, monte-en-l’air pro, se fait choper chez eux. C’est la baraka ! Il parvient à se barrer en douce. Et devient... transparent. Non, tu vois, pas extrêmement anorexique, pas microscopique comme dans J’ai rétréci mon zizi (suis sûr qu’il existe, pas vu mais suis sûr). IN-VI-SI-BLE. Je te dis pas le binz pour le roi de la voltige. Peg, sa copine, a une conception largement plus matérialiste de l’affaire. D’accord, mais c’est quand même pas une vie de côtoyer un évaporé...

Avec son air de ne pas y toucher, le désinvolte Westlake est un sacré manieur de mots. Marieur de mots. Ca fait Crac Boum Hue, ça va finir en terrible dérouillée ou pire, en horrible dérouillée et le Donald, pépère, il te balance une de ses répliques alambiquée à 90° qui te fait chavirer comme le Titanic en phase verticale. Mais en plus drôle. Ca fait des vagues. Des vagues jubilatoires. T’as pas le temps de mettre ton gilet de sauvetage que les canots de survie sont déjà pleins. Et tu crachotes de plaisir. Pas la peine de chercher les morts, y’en a pas. Ils sont tous bien animés les personnages. Animés de troubles penchants, de travers tout de traviole et dotés d’une idiosyncrasie aux accents rédhibitoires les prédisposant à l’entourloupe (là, je te dis pas, j’ai bossé comme un bagnard pour la sortir et je sais toujours pas ce que ça veut dire). Ils sont terriblement humains. Westlake prend un flic, un avocat, deux médecins, un PDG, un trafiquant, tous malhonnêtes. Ils les opposent à un voleur, une maline, un autre flic, tous attachants. De ce contraste nait cette notion que tu connais aussi bien que moi : Le Gros mange le Petit. Ici, le Gros est représenté par le lobby de la cibiche qui, tout comme celui des armes par exemple (je te laisse le choix d’en rajouter à l’envi, fais-toi plaisir), vend de la camarde pour faire du fric. L’auteur enfonce le clou en te montrant avec son extrême finesse leurs manigances, manœuvrées par leur ambition délirante, qui conduisent ici à des situations rocambolesques. Et puis c’est quand même pas tous les jours que tu peux suivre un Freddie transparent, malin comme un singe du Mexique, un Freddie enamouré de sa Peg, un Freddie embarrassée qui se trimballe à poil parce qu’avec des tongs et des chaussettes qui montent jusqu’au mollet comme les ravissants angliches de la côte il se ferait choper illico. Aie pitié de Freddie. Smoke, C’est du belge ! (je tiens à préciser que c’est du belge ! en argot se traduit par c’est du bon ! Espèce de tordus...)

Note : 3.5/5

Mention : Westlake a peut-être pondu mieux que ça, je m’en fiche et tant mieux. Les Dortmunder et autres Parker, je vais tâcher de m’en goinfrer jusqu’à la dernière miette.

« Smoke » Editeur : Rivages ; Date de parution : 05/02/00 ; Collection rivages thriller » ; 407 pages

Donald Westlake, (1933-2008) est né à Brooklyn. Écrivain prolifique et éclectique, il a écrit plus d'une centaine de livres, approchant bon nombre des genres de la littérature policière que ce soit le polar humoristique (son genre de prédilection), le roman policier, le roman noir, le thriller, le fantastique ou même la science-fiction.

Il a écrit sous divers pseudonymes, en particulier ceux de Richard Stark et Tucker Coe. Spécialiste du roman de « casse », ses deux personnages préférés et récurrents sont John Dortmunder, cambrioleur professionnel aux aventures rocambolesques poursuivi par la poisse et Parker (sous le pseudonyme de Stark), jumeau sérieux de Dortmunder, un cambrioleur froid, cynique et efficace. Il a remporté par trois fois le Edgar Award, et a été désigné en 1993 Grand Master de l'association Mystery Writers of America.

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S
Bon, je ne voudrais pas critiquer, mais si Westlake est garé entre King et d'Ormesson, doit y avoir de sérieux embouteillages dans ta bibliothèques ! :-)
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B
Merci pour le conditionnel, Sandrine ! J'ai deux "bibli" : celle d'avant et celle de maintenant. Dans celle de maintenant, c'est plutôt couler noir et rouge. Merci d'être passée sans 'frapper" !